jeudi 27 juin 2013

VII Swords [Deviant Moon]

Parfois, il nous arrive de croire fermement à notre réussite. Comment pourrait-on échouer ? Nous fermons les yeux sur ce qui nous gêne, ceux qui portent d'immenses pancartes marquées de "Tu vas échouer !" éloquents. Une fois plus bas que terre, notre beau projet explosé en mille éclats de verre douloureusement plantés dans notre derrière, on ne peut que constater à quel point notre échec était une certitude. Comment avons nous pu, ne serait-ce que l'ombre d'un instant, être certain que tout allait bien se passer ? Pourquoi nos yeux n'ont pas aperçu les crocs acérés de la défaite ? Pourquoi nos narines n'ont pas décelé la violente odeur de la pourriture d'un projet déjà avorté ? Pourtant, tout le long du chemin, à chacun de nos pas, nous savons. Nous savons pertinemment que nous allons trébucher et nous étaler dans la fange de nos propres peurs. Est-ce l'égo qui nous pousse à refuser la vérité ? Je ne pense pas. Si c'était le cas, ce dernier nous pousserait à arrêter net notre démarche pour ne pas être détruit au bout du compte. La vérité, c'est que nous sommes tous des rêveurs, n'en déplaisent à ceux qui se veulent pragmatiques, qui cherchons à transmuter l'impossible en improbable. « Ça ne marche pas avec cette personne, mais ça ne veut pas dire que ça ne marchera pas avec moi ! ». Nous sommes tous des putains de crétins aveuglés par notre envie d'exploser la normalité, de transcender la banalité pour ne faire qu'un avec le flux du probable. Nous marchons sur un rondin de bois glissant reliant deux falaises séparées par un fleuve de lave rongeant petit à petit les parois et fragilisant le bois du pont. Nous croyons pouvoir arriver au bout tout en étant conscient, ou plutôt inconsciemment conscient, que nous n'y arriverons pas. Sans même voir que pendant cette traversée nous avions les doigts croisés du début à la fin.

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